Loi du 2 avril 1936
relative au transport des marchandises par mer
Art. 1er. La présente loi régit exclusivement les
transports par mer. Elle s'applique seulement depuis la prise en charge des
marchandises sous palan jusqu'à leur remise sous palan au destinataire. Elle ne
s'applique pas aux chartes-parties ; mais, dans le cas d'affrètement par
charte-partie, les connaissements qui peuvent être délivrés y sont soumis.
Art. 2. Après réception des marchandises, le transporteur ou son
représentant devra, sur la demande du chargeur, lui délivrer un connaissement
portant mention des marques et, selon le cas, du nombre des colis et objets, ou
bien de la quantité, de la qualité ou du poids des marchandises, le tout
d'après les indications données par écrit par le chargeur avant l'embarquement.
Les marques doivent être
suffisantes pour l'identification des marchandises et être apposées de manière
qu'elles restent normalement lisibles jusqu'à la fin du voyage.
Le transporteur ou son
représentant peut refuser d'inscrire au connaissement les déclarations du
chargeur relatives aux marques, au nombre, à la quantité, à la qualité ou au
poids des marchandises, lorsqu'il a de sérieuses raisons de douter de leur
exactitude ou qu'il n'a pas eu les moyens normaux de les contrôler.
Mais, dans ce cas, il
doit faire mention spéciale de ces raisons ou de cette impossibilité. La preuve
des manquants incombe alors à l'expéditeur ou au réceptionnaire.
Le récépissé délivré au
chargeur avant l'embarquement des marchandises sera, après leur embarquement,
échangé sur sa demande contre un connaissement régulier.
Art. 3. Toute inexactitude commise par le chargeur dans les
déclarations relatives aux marques, au nombre, à la quantité, à la qualité ou
au poids des marchandises, engage sa responsabilité à l'égard du transporteur,
pour tous dommages, pertes et dépenses en résultant, mais ce dernier ne pourra
se prévaloir de cette inexactitude à l'égard de toute autre personne que le
chargeur.
Art. 4. Le transporteur est
garant de toutes pertes, avaries ou
dommages subis par la marchandise à moins qu'il ne prouve que ces pertes,
avaries ou dommages proviennent :
1° de fautes nautiques
du capitaine, des marins, pilotes ou autres préposés ;
2° de vices cachés du
navire ;
3° de faits constituant
un cas fortuit ou de force majeure ;
4° de grèves ou lock-out
ou d'arrêts ou entraves apportés au travail pour quelque cause que ce soit,
partiellement ou complètement ;
5° du vice propre de la
marchandise ou d'un défaut d'emballage ou de marques, de déchets de route en
volume ou en poids dans la mesure des tolérances d'usage aux ports
destinataires ;
6° d'un acte d'assistance
ou de sauvetage ou de tentative faite dans ce but ou encore de déroutement du
navire effectué à cet effet.
Toutefois, dans tous ces
cas exceptés, le chargeur pourra faire la preuve que les pertes ou dommages
sont dus à une faute du transporteur ou à une faute de ses préposés non
couverts par le paragraphe 1" de cet article.
Art. 5. La responsabilité du transporteur ne peut, en aucun cas,
dépasser, pour les pertes ou dommages subis par les marchandises, une somme de
[100.000 francs métropolitains] par colis ou par unité, à moins que la nature
et la valeur de ces marchandises aient été déclarées par le chargeur avant leur
embarquement.
Cette déclaration sera
insérée au connaissement. Elle fera foi à l'égard du transporteur, sauf preuve
contraire de sa part.
Si le transporteur
conteste l'exactitude de la déclaration au moment où elle est effectuée, il est
autorisé à insérer dans le connaissement des réserves motivées, qui mettront la
preuve de la valeur véritable à la charge de l'expéditeur ou réceptionnaire.
Est nulle toute clause
par laquelle le transporteur limiterait sa responsabilité à une somme
inférieure à celle fixée par le présent article.
La somme fixée ci-dessus
pourra être révisée par décret, pour tenir compte des fluctuations monétaires
internationales.
Art. 6. Lorsque le chargeur a fait une déclaration sciemment
inexacte de la nature ou de la valeur des marchandises, le transporteur
n'encourt aucune responsabilité pour les pertes ou dommages survenus à ces
marchandises.
Art. 7. Les marchandises de matière inflammable, explosive ou
dangereuse, à l'embarquement desquelles le transporteur ou son représentant
n'eût pas consenti s'il avait connu leur nature, pourront, à tout moment et en
tous lieux, être débarquées, détruites ou rendues inoffensives par le
transporteur, et ce, sans aucune indemnité ; le chargeur sera, en outre,
responsable de tous les dommages et dépenses pouvant résulter de leur
embarquement.
Lorsque le transporteur,
connaissant la nature de ces marchandises, a consenti à leur embarquement, il
ne peut les débarquer, les détruire ou les rendre inoffensives que dans le cas
où elles mettraient en danger le navire ou la cargaison ; aucune indemnité ne
sera due, sinon à titre d'avaries communes s'il y a lieu.
Art. 8. En cas de pertes ou dommages survenus aux marchandises, le
réceptionnaire doit adresser des réserves écrites au transporteur ou à son
représentant au port de déchargement, au plus tard au moment de la prise de
livraison, faute de quoi les marchandises sont présumées, sauf preuves
contraires, avoir été reçues par lui telles qu'elles sont décrites au
connaissement.
S'il s'agit de pertes ou
dommages non apparents, cette notification peut être valablement faite dans les
trois jours de la livraison, jours fériés non compris.
Le transporteur aura
toujours le droit de demander qu'une constatation contradictoire de l'état des
marchandises soit faite lors de leur réception.
Dans tous les cas,
l'action contre le transporteur à raison de toutes pertes et dommages est
prescrite un an après la livraison des marchandises et, si la livraison n'a pas
lieu, un an à dater du jour où elles auraient dû être livrées.
Art. 9. Est nulle et de nul effet dans un connaissement ou titre
quelconque de transport maritime toute clause ayant directement ou
indirectement pour objet de soustraire le transporteur à la responsabilité que
le droit commun ou la présente loi mettent à sa charge ou de renverser le
fardeau de la preuve tel qu'il résulte des lois en vigueur et de la présente
loi.
Doit être considérée
comme clause d'exonération la clause cédant au transporteur le bénéfice de
l'assurance des marchandises ou toute autre clause semblable.
Cet article ne
s'applique ni aux transports des marchandises chargées sur le pont, ni au
transport des animaux vivants.
Art. 10. Les actions principales
et récursoires seront portées devant les tribunaux désignés par les règles de
compétence du droit commun.
[...]
La clause compromissoire
ne pourra en aucun cas conférer aux arbitres le pouvoir d'amiables
compositeurs.
Est nulle et non avenue,
en matière de navigation réservée, toute clause, y compris le cas de prévision
d'arbitrage, qui aurait pour effet de déplacer le lieu où doit être jugé le
litige selon les règles portées à la présente loi.
Art. 11. Sont abrogées toutes
dispositions contraires à la présente loi.
Art. 12. La présente loi est
applicable [...] aux colonies.
Art. 13. La présente loi entrera
en vigueur trois mois après la date à laquelle aura pris effet la ratification
par la France de la convention de Bruxelles.